петак, 14. јун 2013.

КОНСТАНТИНУ КОНСТАНТИНОВИЧУ


155,

Cettigné, le 30. avril 1900,

 

Cher et excellent ami

Rien de plus insipide que d'entendre parler une personne qui s'écoute elle même, ou de lire quelque chose où perce à chaque ligne la prentention à l'érudition et au style de Me de Sévigné. Toi qui connais tous les travers de la plume et tous ses mérites, ne partages-tu pas mon opinion? Du naturel donc! Aussi commencé'je par Te dire simplement que le télégramme de félicitations pour la S1 Georges que tu m'as adressé de Berlin, m'a fait un immense plaisir. Qui, cher ami, j'ai été très sensible, à ton bon souvenir. Victor m'avait déjà télégraphié la veille. J'avais bien pensé aussi à Vous deux, et me demandais si ces chers amis allaient, au milieu des fastes qu'un grand Empereur étalait à leurs yeux, se souvenir à Berlin des modestes fêtes de l'été dernier à Cettigné.

Vous vous en tes souvenus et Vous m'en avez donné une preuve touchante en m'envoyant Votre cri du coeur „ Живио господap!“au plus fort des brillantes et grandioses solennités allemandes... Merci, merci, cela ma fait vraiment du bien.

Depuis bien longtemps je ne T'ai pas écrit. Ne m'en veuille pas, cher, je me sens vieillir, ramollir et ne suis plus bon à rien! Une seule chose, pourrait me rajeunir: une guerre avec l'Autriche! Elle me rendrait toute ma force et toute ma jeunesse. Je grimperais alors les montagnes comme à vingt ans, je descendrais les vallées au pas de course, au galop, comme un possédé. Ah! cette Autriche nous a fait beaucoup de mal et elle nous en fait tous les jours! Depuis surtout de son néfaste entente de 1897 avec la Russie, elle s'est déchaînée contre nous, elle se fait crâne vis-à-vis des faibles. Mais tout de même nom d'un chien! si je ne craignais pas de mécontenter notre empereur et d'entraîner pour nous la Russie, dans des complications internationales, je ferais voir à cette Autriche ce que nous sommes et se que nous valons. Si j'avais seulement dans mes magasins 50.000 tchêtverts de blé et 8.000.000 de cartouches en plus de ce que je possède déjà, je lui déclarerais demain la guerre, je Fhumielierais, et ne demanderais jamais à la Russie d'intervenir, et ce grand Etat autrichien tout, grand qu'il est, se verrait embarrassé et ridiculisé à faire pitié, par nous,.. par nous, mon cher Constantin ... — Tu es fou, me diras-tu. — Non je suis l'homme le plus sensé quand j'avance ce qui précède, et jamais je ne suis plus dans le vrai que lorsque je dis à qui veut l'entendre, que le petit Monténégro suffisament pour vu des choses matérielles humilierait la grande Autriche! — Gascon! — Non, je ne suis pas Gascon, mon cher, je connais trop bien mes hommes, et mes voisins aussi. — Pensestu de même de la Turquie. — Oh! non, certes. La Turquie est encore trop forte pour nous seuls, et le terrain n'est pas du tout le même de son côté. Mais nous soutiendrions aussi contre elle une belle résistance. Attends-toi donc mon cher un de ces jours, lorsque la goutte fera déborder le verre, à voir de jolies choses dans ces parages. Je ne ferai rien pour compromettre qui que ce soit, je ne demanderai rien du tout à personne. Si la Russie, voyant notre martyre, est portée à envoyer du pain à mon peuple, bon! ai non, nous crèverons de faim comme des chiens, mais nous venderons chèrement notre peau!

A moins qu'on ne fasse des lois internationales ex-ceptionelles pour nous, le pain ne sera pas, je l'espère, considéré comme engin de guerre dont la réception serait interdite aux belligérants. C'est tout ce que nous demanderons à la Russie. Donc, cher, quand tu entenderas qu'on fait ici panf'panf nos communications avec le monde seront suspendues, et de ce fait notre cri de détresse ne pourra parvenir jusqu'à vous: matin et soir tu iras alors implorer l'Empereur pour nous; non pas qu'on nous en-Voie des hommes ni des roubles, ni que sais-je encore mais, du pain et du personnel de la Croix Rouge. Si, comme je l'éspire, l'Empereur prête gracieusement l'oreille à tes instances, taille alors ta meilleur plume, ta plume de Tolède, et prépare toi à écrire une épopée d'un nouveau genre, une épopée étonnante, grandiose, sans pareille dans îa littérature dont je te fournirai le sujet émouvant et tragique. Verses-y des larmes, pour en faire couler aux autres sur le sort bizarre du vlieux ,,rocno-sap“ Prométhée moderne de la Montagne-Noire!

Cher, je reviens à ton télégramme de Berlin. Comme tu es bon et aimable, et comme je T'en suis reconnaissant. Ne m'oublie donc pas non plus dans l'avenir.

Mon gendre Herre a perdu sa mère! Pauvre cher garçon. Pauvre grande duchesse, Alexandra Petrovna! Elle a été si bonne pour moi, et elle a fait tant de bien aux pouvres et à l'Eglise! Ta douce et excellente mère a longtemps été la mère de Pierre, il m'en a souvent parlé avec amour, tendresse et reconnaissance.

Que comptets-tu faire de Ton été? Penses—Tu à Paris voir l'Exposition? Et les grandes manoeuvres? Où auront-elles lieu cette année? Y prendras-tu part? Moi pauvre non hélas. F)igures-toii que mai (je te le dis très confidentiellement) régnant depuis quarante ans, prince-slave, allié fidèle de la Russie bien vu et agrée par les Empeureurs avec une gracieuse bienveillance, je n'ai jamais été pourtant invité à venir en Russie. Si j'y suis allé qualque fois, c'était toujours à la suite d'un désir-désir naturel qui émanait de moi, mais jamais, jamais on n em'a dit Viens nous voir, toi, tu et des nôtres, tu es à nous, toi petit prince de Monténégro; viens voir nos camps, nos braves soldats, cela t'intéressera; Ton coeur slave se réjouira en voyant les forces slaves car to,i aussi tu es soldat; soldat, irrégulier, quoi, un bachibouzouk slave, mais pourtant bon à quelque chose. Rien de tout cela! Qui songerait d'ailleurs à moi autrement que quand je sollicite d'être vu = ... Cher, je t'en prie, que cette petite plainte que Tu entends ne sorte pas du cercle de notre intimité, j'aurais peur quelle ne laissât supposer l'ombre même d'un refroidissement dans mon coeur, qui est tout entier à l'Empereur, toujours débordant de reconnaiissance profonde et filiale. La Reine Ta sour me donne aujourd'hui la bonne nouvelle du mariage de ta nièce qui se faira aujourd'hui à Corfoù. Je m'associe du fond du coeur à Votre joie de famille et fais des voeux sincères pour le bonheur des nouveaux Epoux. Quelle jaïe pour le coeur de Ta soeur chérie, elle les mérite toutes cette douce et sainte Soeur!

Mon petit fils Georges m'écrit combien la Grande Duchesse et toi êtes bons pour lui, cher et excelent ami. Il en est si reconnaissant. De mon côtéj'en suis vivement ému. Comment Vous remercier assez de Votre générosité? Avec l'expression de toute ma gratitude, je Te prie de mettre aux pieds de la Grande Duchesse mes hommages profondément respectueux, et à ta chère Mère toute ma vénération. Salue je Te prie de ma part Ton excellent frère Dimltri.

Je ferme ici cette lettre déjà longue, cher ami, en Te réitérant à toi-même tous mes remerciments et en T'assurant de mes sentiments les plus cordialement affe-tueux.

 

Nicolas
 

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